Le soleil est en train de se coucher sur le plateau abrupte qui entoure la cité athénienne. Il ne fait jamais bon trainer par là une fois la nuit tombée, trop de chemins escarpés et dangereux pourraient entrainer le voyageur naîf et inexpérimenté à sa perte.
Pourtant, une silhouette se bouge péniblement à travers un des chemins à flanc de montagne. Une main contre la paroi, pour se tenir équilibré; l'autre posée sur son flanc comme pour faire pression.
Tout en marchant du mieux qu'il peut, cet étrange voyageur perd un peu de lui même à chaque pas qui le rapproche d'Athène. N'importe quel pisteur pourrait retrouver sa trace en suivant les marques au sol. Le rouge est une couleur bien visible surtout lorsqu'il est mis sur les terres sèches et arides grecques.
Une toux....cela ressemble plus à un râle qu'à une simple toux. Le voyageur se penche en avant et crache difficilement. Encore ce liquide rouge. Il vient s'ajouter au filet qui coule continuellement du ventre de celui-ci. Bientôt, les bêtes sauvages, alléchées par l'odeur de tout ce sang seront là. Serat il encore de ce monde pour les repousser?
Un pas mal assuré et c'est la chute. Il reste quelques instants face contre terre, tant bien que mal il essaye de se relever mais il sait bien que c'est peine perdue. Sa volonté le quitte et pour lui semble sonner l'heure de la fin.
Il essaye malgré tout de s'asseoir; dans un effort douloureux il enlève la lourd boite de métal qu'il transporte. Peut être que si il ne l'avait pas portée il serait arrivé à bon port mais pour rien au monde il n'aurait voulu se séparer de ce cadeau divin. Il avait juré de s'en montrer digne jusqu'à la mort, au moins il pourra tenir cette promesse.
Il est maintenant adossé à la paroi de la montagne, il regarde le paysage. Le ciel est magnifique à cette heure-ci, les derniers rayons de soleil réchauffent son visage et lui fait oublier quelques instants son immense douleur.
Le sang continue de tomber de sa plaie béante, mais c'est là le dernier de ses soucis. Il aurait tant voulu revoir le Parthénon une dernière fois, saluer ses compagnons. Mais désormais il sait qu'il est trop tard; au loin il parvient à apercevoir la statue d'Athéna.
Un non initié ne pourrait reconnaitre celle-ci d'aussi loin mais il était passé tellement de fois à côté que même sans la distinguer parfaitement il savait que c'était elle.
"Désolé ma déesse. J'aurais voulu être là une toute dernière fois...Mais ça ne sera pas possible, je suis trop las."
Il regarde une dernière fois l'urne à ses côtés. Elle continue de briller de mille feux, heureusement qu'elle n'a pas suivie la déchéance de son propriétaire. Il ne peut pas la laisser ici, à la portée d'âmes malveillantes. Un dernier effort doit être accompli pour la mettre à l'abri.
Une aura rouge se met à entourer le corps meurtri du voyageur. Il a repéré une faille dans la roche à quelques mètres de lui; délicatement, la pierre s'entrouve. Derrière se trouvait une cavité, trop petite pour accueillir un homme et le protéger mais juste assez grande pour l'urne.
Il la déposa délicatement, puis de nouveau une aura rouge l'entoura. La roche se referma sur la cavité. Epuisé par ce dernier effort il s'écroula.
"Au moins elle sera à l'abri ici; Athéna saura quoi faire par la suite. Quelle ironie du sort...cette montagne sert de bouclier naturel à la cité athénienne et maintenant elle va avoir en son coeur même l'armure de Bronze du Bouclier. A croire que le destin fait vraiment bien les choses."
Le soleil est maintenant presque couché. La roche blanche tout autour du corps est immaculée de sang. Son souffle est de plus en plus court, il a l'impression que le peu de vie qui lui reste part en même temps que le soleil.
Il a toujours le regard porté vers le Parthénon, mais ses yeux se ferment petit à petit. Jusqu'au bout il lui fera face, jusqu'au bout il sera un Chevalier d'Athéna. L'immense douleur qui auparavent habitait son corps a maintenant disparu, il ne ressent plus rien. Jamais il n'avait connu cette douce sensation. C'était peut être aussi la dernière fois.
Petit à petit il parvient à lever sa main droite pleine de sang en direction de la statue de la déesse.
"Athé..na....."
Sa main retombe au sol, tout comme son buste et sa tête.
Le soleil vient de se coucher......